Description
L’acquisition du langage en contexte bilingue constitue un champ d’étude central dans la linguistique appliquée, la psycholinguistique et la sociolinguistique, en raison des implications cognitives, éducatives et sociales qu’elle recèle. Contrairement à l’acquisition monolingue, le bilinguisme introduit des dynamiques complexes dans le développement linguistique, cognitif et interactif de l’enfant, exigeant une approche intégrée qui combine perspectives théoriques et données empiriques. Ce phénomène ne se limite pas à l’apprentissage simultané de deux langues, mais englobe également les variations contextuelles, la fréquence d’exposition, la qualité des interactions, ainsi que les facteurs socio-culturels et affectifs influençant le processus. D’un point de vue théorique, plusieurs modèles ont été développés pour rendre compte des trajectoires développementales des enfants bilingues. Le modèle unitaire de lexique suggère que les enfants initialement développent un lexique unique avant de différencier les langues, tandis que le modèle dual postule dès le départ l’existence de deux systèmes linguistiques distincts, interconnectés mais indépendants. Les recherches contemporaines mettent en évidence que le bilinguisme n’induit pas une confusion linguistique systématique, mais favorise au contraire des compétences métalinguistiques supérieures, telles que la capacité à reconnaître les structures syntaxiques et sémantiques spécifiques à chaque langue, ainsi que la flexibilité cognitive. Cette flexibilité se traduit par une meilleure gestion des interférences, une inhibition sélective des langues non pertinentes et une attention accrue aux marqueurs contextuels. Les fondements cognitifs de l’acquisition bilingue reposent sur plusieurs mécanismes essentiels. L’exposition précoce et continue à deux langues favorise le développement du traitement phonologique, de la mémoire de travail verbale, et des compétences en analyse morphosyntaxique. Des études longitudinales montrent que les enfants bilingues présentent souvent des délais initiaux dans la production lexicale comparés à leurs pairs monolingues.